Qu’on le sache ou non, le « Made in America » est un phénomène séculaire dans l’histoire des États-Unis, au cours de laquelle il a été utilisé tour à tour comme politique publique, slogan politique ou stratégie marketing.
Il est donc en quelque sorte normal que cette ambition ressurgisse aujourd’hui au sein des deux principaux partis américains, qui voudraient rapatrier – au moins partiellement – une production industrielle aux États-Unis. Dans les faits, le mouvement est clairement enclenché et visible, et il est même possible qu’il s’accélère ces prochaines années.
Même s’il semble un peu trop optimiste d’imaginer que les États-Unis parviendront à recouvrer leur statut de « grande puissance industrielle », voici trois thèmes dans lesquels les professionnels de l’investissement de Capital Group observent une évolution significative :
- La « politique de la carotte et du bâton » semble faire effet
L’administration Trump – tout comme l’administration Biden avant elle – a recours à une combinaison de mesures d’incitation (fiscalité avantageuse) et de sanctions (droits de douane) pour encourager certaines des plus grandes entreprises au monde à construire de nouvelles usines sur le territoire américain.
« La réindustrialisation des États-Unis est une ambition réaliste dans certains secteurs spécifiques en rapport avec la sécurité intérieure. Mais il faudra du temps et des efforts concertés pour la mener à bien », ajoute Tom Cooney, conseiller en politique internationale chez Capital Group et ancien diplomate au Département d’État des États-Unis. « Les filières industrielles des semi-conducteurs, des centres de données pour l’IA et de la construction navale pourraient ainsi bénéficier d’un soutien politique fort, voire de subventions. »« Cela pourrait être plus compliqué pour d’autres secteurs, comme ceux de l’automobile et de l’électronique. Je pense toutefois que le gouvernement américain fera tout ce qu’il peut pour rapatrier des activités en lien avec les grands enjeux de sécurité. »
- L’essor de l’IA donne un coup de fouet à la croissance américaine
De tous les secteurs dans lesquels les entreprises se sont engagées à rapatrier leur appareil de production aux États-Unis, c’est celui de l’IA qui aura le plus d’impact – et de loin. L’engouement pour cette technologie se traduit déjà par la construction de nombreux centres de données à travers le pays.
« La multiplication des centres de données crée une scission entre les filières industrielles », explique Nate Burggraf, analyste d’investissement actions chez Capital Group, chargé de suivre les sociétés du secteur industriel. « D’un côté, il y a les acteurs de la construction, qui profitent de l’essor de l’IA, et de l’autre, tous les autres industriels, qui sont relégués au second plan, tels que les services commerciaux, la logistique ou encore le transport. À ce jour, la réindustrialisation des États-Unis est donc avant tout liée à l’essor de l’IA. »
- La production de médicaments vitaux revient sur le territoire américain
Dans plusieurs secteurs, la relocalisation de la production est un processus complexe, et la filière pharmaceutique en fait partie, en particulier pour certains besoins médicaux particuliers. Cette réalité est apparue au grand jour avec la rupture des chaînes d’approvisionnement survenue pendant la crise du Covid-19, où les États-Unis ont eu beaucoup de difficultés à se fournir en médicaments et en matériel médical.
Le secteur pharmaceutique s’est initialement montré plus réservé à l’idée de déplacer ses usines vers les États-Unis, aujourd’hui implantées essentiellement dans des pays à bas coûts, comme la Chine et l’Inde. Mais quelques géants du secteur sont en train de revoir leur copie, attirés aussi bien par les généreuses incitations fiscales offertes par les États-Unis, que par la perspective d’éviter la hausse des droits de douane.
« L’augmentation des capacités de production pharmaceutique sur le territoire américain est nécessaire, et on voit que cela commence à bouger dans le bon sens », confirme Charles Ellwein, gérant de portefeuille actions chez Capital Group.
Alors, le « Made in America » est-il de retour ?
Reste à savoir jusqu’à quel point les États-Unis parviendront à se réindustrialiser. L’avenir nous le dira, mais il est important de garder à l’esprit que seul un nombre limité de filières pourraient être portées par la version moderne du concept « Made in America ».
« Soyons réalistes : il est peu probable que les États-Unis redeviennent une puissance industrielle. Cela fait bien longtemps que cela n’est plus possible », conclut Steve Watson, gérant de portefeuille actions chez Capital Group. « Je pense en revanche que l’économie américaine peut gagner en autonomie, en particulier pour les produits de base, comme les microprocesseurs et les articles pharmaceutiques. »
Et de conclure : « Il est vrai que, par leur vigueur, les mesures annoncées par les États-Unis ébranlent les marchés. Mais leur objectif est sans équivoque : redessiner le commerce mondial, et non y mettre fin. »
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