Fondatrice d’AMS Patrimoine, Marie-Sophie Lecluyse défend depuis plusieurs années une vision profondément humaine de la gestion patrimoniale. Formée à l’AUREP et issue de l’ingénierie patrimoniale, elle accompagne particuliers, chefs d’entreprise et familles, tout en développant une expertise rare auprès des publics vulnérables. Ambassadrice France Tutelle pour l’Occitanie, elle place l’écoute, l’éthique et la pédagogie au cœur d’un conseil indépendant. Dans cet entretien, elle revient sur son métier, la relation client et les exigences croissantes d’un environnement devenu plus incertain.
Votre rôle est-il avant tout de planifier le long terme ou de gérer les urgences du quotidien ?
Mon rôle ne se limite pas à l’un ou à l’autre : il consiste à créer un cadre solide pour le long terme tout en apportant des solutions concrètes aux urgences du quotidien.
Le long terme, c’est la base : structurer le patrimoine, sécuriser le civil, anticiper la retraite, optimiser la fiscalité, protéger la famille… Ce sont les fondations qui permettent à mes clients d’avancer sereinement, sans risque de mauvaises surprises.
Mais dans la vraie vie, il y a aussi les imprévus : un divorce, une succession compliquée, une opportunité d’investissement, la vente d’une entreprise, la nécessité d’aider un parent vulnérable… Et dans ces moments-là, on a besoin d’un conseil réactif, pragmatique, et surtout humain.
En tant que CGP, je suis justement là pour articuler les deux :
- accompagner les décisions urgentes sans perdre de vue la stratégie globale ;
- et construire une stratégie globale qui reste suffisamment souple pour répondre aux urgences.
Au fond, mon travail, c’est d’être la personne de confiance à appeler quand quelque chose se passe (de prévu ou d’imprévu) et d’aider à trouver la meilleure décision pour aujourd’hui comme pour demain.
Quelle place occupent la pédagogie et la psychologie dans la relation avec vos clients ?
Elles occupent une place centrale — probablement autant que les chiffres.
En gestion de patrimoine, on parle d’argent… mais surtout de projets de vie, de peurs, d’histoires familiales, de vulnérabilités, de transmissions, de décisions difficiles. On ne peut pas accompagner quelqu’un efficacement si on ne comprend pas qui il est, ce qui l’anime, et ce qui le freine.
La pédagogie, c’est ce qui permet de rendre les choses compréhensibles et accessibles.
Je refuse que mes clients signent quelque chose qu’ils ne comprennent pas.
Mon rôle est d’expliquer, de traduire, de simplifier :
- pour redonner du pouvoir de décision ;
- pour éviter les erreurs ;
- pour aider chacun à avancer avec confiance.
La psychologie, c’est ce qui permet d’écouter vraiment.
Chaque personne arrive avec son histoire : un chef d’entreprise qui a peur de se tromper, un parent inquiet pour ses enfants, une personne vulnérable qui a besoin d’être rassurée, un couple à réconcilier sur ses objectifs…
Il faut savoir se mettre à leur place, entendre ce qui n’est pas dit, respecter leurs émotions et leurs limites.
Selon moi, notre métier ne se résume pas à optimiser un patrimoine : il consiste à accompagner des choix profondément humains, parfois sensibles, avec précision, tact et bienveillance.
C’est cette approche qui construit une relation de confiance durable avec nos clients.
Qu’est-ce qui fragilise le plus la confiance selon vous : une sous-performance passagère ou un conseil inadapté ?
Sans hésiter : c’est le conseil inadapté qui fragilise le plus la confiance.
Une sous-performance, quand elle est expliquée, contextualisée et intégrée dans une stratégie cohérente, fait partie de la vie d’un portefeuille.
Les marchés montent, descendent, respirent.
Un client peut l’entendre dès lors qu’il sait pourquoi cela arrive et que la feuille de route reste claire.
En revanche, un conseil inadapté laisse une trace durable :
- parce qu’il montre que le besoin n’a pas été compris ;
- parce qu’il peut mettre en danger un projet de vie ;
- et parce qu’il donne le sentiment d’avoir été mal guidé.
La confiance se construit sur la transparence, la sincérité du conseil et la cohérence dans le temps — pas sur la promesse d’un rendement parfait.
La pédagogie, c’est offrir la compréhension nécessaire pour transformer une décision en conviction.
Marie Sophie LECLUYSE |
Oui, clairement. Les crises récentes ont profondément changé les attentes des clients.
Aujourd’hui, les gens ne veulent plus seulement qu’on « place leur argent ».
Ils veulent comprendre, être rassurés et savoir qu’ils ne sont pas seuls face à un monde qui bouge vite.
Avec le Covid, l’inflation, la hausse des taux, les tensions géopolitiques… beaucoup ont réalisé que leur patrimoine devait être solide, adaptable, et surtout suivi de près.
Ce que mes clients me demandent désormais, c’est :– « Est-ce que je suis bien protégé ? »
– « Comment réagir si une nouvelle crise arrive ? »
– « Est-ce que mes décisions ont du sens pour ma famille, pour l’avenir ? »
Ils attendent plus de pédagogie, plus de proximité, plus de transparence.
Ils veulent qu’on leur explique les choses simplement, qu’on leur dise ce qui est important, et qu’on les aide à prendre les bonnes décisions au bon moment.
Au fond, les crises ont rappelé que la gestion de patrimoine n’est pas un luxe :
c’est un accompagnement humain qui aide à garder le cap, même lorsque l’actualité devient incertaine.
Comment envisagez-vous de renforcer la relation de confiance et la proximité client dans les années à venir ?
Pour moi, renforcer la confiance et la proximité, ce n’est pas une promesse : c’est une manière de travailler, et je vais continuer à l’approfondir dans les années à venir.
D’abord, en restant indépendante.
Mes clients savent que mes conseils sont objectifs.
Ensuite, en développant encore plus la pédagogie.
Je veux que chaque client comprenne ce qu’il fait, pourquoi il le fait, et quelles conséquences cela aura.
Plus on comprend, plus on est serein, et plus la confiance s’installe.
- des points réguliers ;
- des outils plus simples pour visualiser leur situation ;
- et une disponibilité réelle quand ils en ont besoin.
Enfin, je veux rester très attentive à l’humain : écouter, comprendre les changements de vie, les inquiétudes, les projets.
Le patrimoine n’est jamais que le reflet d’une histoire personnelle — et c’est cette histoire qui doit guider le conseil.
En résumé : plus de clarté, plus d’écoute, plus de disponibilité, et toujours la même exigence d’indépendance et de bienveillance.
C’est cela, pour moi, la vraie proximité.